La Saint-Valentin, symbole de la décadence occidentale pour la Russie

Le président Poutine félicitant le patriarche Kirill, le 1er février 2024, date du quinzième anniversaire de son arrivée à la tête de l’église orthodoxe russe.

Le 14 février est généralement synonyme de roses rouges et de ballons en forme de cœur. Mais pour certains États, la fête des amoureux renvoie l’image d’un Occident décadent. Parmi eux, la Russie est en première ligne. Plusieurs institutions russes, dont l’Église orthodoxe, réclament son interdiction.

Dans le contexte du tournant conservateur opéré depuis plusieurs années en Russie, le patriarche Kirill a déclaré que la Saint-Valentin était de la « propagande » et de « l’idéologie LGBT ». « La célébration de la soi-disant Saint-Valentin, importée d’Occident, reste une propagande pour des relations qui n’ont rien à voir avec l’amour véritable », a affirmé le chef religieux proche du Kremlin, rapporte France Info. Cette opinion est partagée par le pouvoir. Un député de la Douma a demandé que l’on ne puisse pas évoquer la fête dans les écoles et les administrations.

La fête des amoureux a été introduite en Russie après la chute de l’Union soviétique, mais les autorités l’ont combattue dès son importation. Le pouvoir a même créé une fête concurrente, « la journée de la famille, de l’amour et de la fidélité », le 8 juillet, mais elle n’a pas pris la même ampleur que la Saint-Valentin.

Selon le Moskvitch Mag, 63% des Moscovites ne fêteront pas la Saint-Valentin cette année et disent ne pas la reconnaître. Pourtant, l’aspect commercial semble fonctionner. Les restaurants de la capitale russe affichent complets en ce 14 février, et proposent des formules spéciales pour l’occasion.

Autres interdictions

D’autres pays ont tenu des propos similaires à la Russie. Ces dernières années, la Saint-Valentin est devenue populaire auprès des jeunes de nombreux pays d’Asie de l’Est. Mais au Cambodge, les autorités ont mis en garde les jeunes, les priant d’éviter « les activités inappropriées » qui pourraient leur faire « perdre leur dignité ».

Dans ce pays où les femmes subissent une forte pression pour rester vierges jusqu’au mariage, les plus conservateurs perçoivent la fête des amoureux comme une importation étrangère menaçant les valeurs traditionnelles bouddhistes. Soulignant qu’« il ne s’agit pas d’une tradition khmère », une directive du ministère cambodgien de l’Éducation appelle les écoles à « prendre des mesures pour empêcher les activités inappropriées le jour de la Saint Valentin ».

Au Pakistan, la célébration de la fête a été interdite en 2017. Une interdiction confirmée en 2018 par la Haute Cour d’Islamabad, qui considère la Saint-Valentin comme la « fête de l’immoralité, de la nudité et de l’indécence ». Dans la rue, on peut cependant voir des vendeurs de ballons rouges en forme de cœur.

La situation était similaire en Arabie saoudite jusqu’en 2016. La Saint-Valentin était considérée comme contraire aux mœurs islamiques de bienséance, et la police religieuse punissait notamment les vendeurs de roses. Mais Mohammed Ben Salman, le prince héritier, s’attelant à donner une image moins stricte le royaume islamique, a permis un adoucissement des règles. À Ryad, les vitrines exposent désormais de nombreux produits rouges associés à des offres promotionnelles en cette période. Il n’est toutefois pas fait explicitement mention de la Saint-Valentin.