Oleksandr Syrski, à gauche du président Volodymyr Zelensky le 30 novembre dernier près de Kharkov, est le nouveau chef d’état-major de l’armée ukrainienne.
Un changement en pleine guerre, comme à la recherche d’un nouveau souffle. Après avoir commandé pendant un peu plus de deux ans les forces armées ukrainiennes, le général Valery Zaloujny a officiellement cédé sa place, jeudi 8 février. Depuis plusieurs mois, les rumeurs sur son départ et une brouille avec le président Volodymyr Zelensky étaient commentées dans la presse et les chancelleries occidentales.
C’est l’ancien commandant des forces armées terrestres, Oleskandr Syrsky, qui devient le nouveau chef d’état-major de l’armée ukrainienne. L’homme de 58 ans, « le général le plus expérimenté d’Ukraine », selon Volodymyr Zelensky, arrive à un moment charnière du conflit. Alors que 2023 a confirmé l’échec de la contre-offensive, 2024 débute avec un soutien occidental qui s’essouffle et des forces russes qui poussent partout où elles le peuvent sur le front.
« Nouvelle équipe de direction »
«Ã‚ Nous devons faire de cette année une année cruciale. » Dans son discours annonçant « une nouvelle équipe de direction » àla tête des forces armées ukrainiennes, Volodymyr Zelensky sait combien le risque est grand de changer les états-majors au cours d’une guerre, mais la décision n’est en rien exceptionnelle. En 1915, la France avait par exemple remplacé Joffre, chef d’état-major général des armées depuis 1911, par Robert Nivelle.
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Voilà donc que, après le populaire Valery Zaloujny, arrive Oleskandr Syrsky. Né en 1965 dans l’oblast de Vladimir en Russie, il a étudié dans les années 1980 à l’école supérieure de commandement interarmes de Moscou. Alors qu’il est affecté dans la république soviétique d’Ukraine, il décide de rester dans le pays à la chute de l’URSS. Il poursuit alors ses études militaires et commence à gravir les échelons dans l’armée ukrainienne.
Il dirige la 72? brigade mécanisée puis devient en 2013 général de division et chef adjoint du principal centre de commandement des forces armées. Quand le conflit éclate dans le Donbass, Syrsky est nommé commandant adjoint de l’opération défensive ukrainienne, avant d’en prendre les rênes trois ans plus tard, rapporte le Kiyv Independent. Il joue un rôle clé dans plusieurs batailles et coordonne le repli des troupes ukrainiennes quasiment encerclées à Debaltseve.
Génération d’officiers formés à la soviétique
En 2019, le colonel-général monte encore dans la hiérarchie et prend la tête des forces terrestres ukrainiennes. Lors de l’invasion de son pays le 24 février 2022, il va s’illustrer dans la défense de Kiev : il découpe la ville et sa région en zones assignées à des commandants, qui agissent de façon décentralisée, en fonction de la réalité du terrain et de l’avance ou non des troupes russes.
La capitale sauvée, Syrsky prépare l’offensive. En septembre 2022, les forces ukrainiennes bousculent les lignes de défense russe dans le secteur de Kharkov, libérant 12 000 km² de territoire. Il doit ensuite gérer la bataille de Bakhmout, ainsi que la contre-offensive de juin 2023, qui ne permet pas de percer le dispositif russe.
Malgré ces succès, Oleskandr Syrsky est moins connu et populaire que son prédécesseur. Issu de cette génération d’officiers formés à la soviétique, il est décrit par certains soldats comme un « boucher », peu soucieux de la vie des combattants. « Syrsky a poussé à la défense sanglante de Bakhmout alors que cela valait la peine d’en faire sortir les gens. C’est un homme dirigé par Zelensky », confie anonymement un commandant d’une batterie de mortiers au Kiyv Independent.
À LIRE AUSSI Guerre en Ukraine : dans l’enfer de la ligne zéro « Dans quelques mois, il y aura probablement des tentatives de mener des actions d’agression ou quelque chose comme ça. Parce que Syrsky suivra Zelensky. Et Zelensky veut de grandes victoires », affirme un officier ukrainien au Washington Post. Des avis peu amènes du front, qu’il convient cependant de nuancer. Oleskandr Syrsky était alors sous les ordres de Valery Zaloujny, qui avait son mot à dire dans la défense ou non de la ville. Bien que formé à l’école militaire soviétique, le nouveau chef d’état-major était responsable de la coopération militaire de l’Ukraine avec l’Otan, visant à rapprocher l’armée ukrainienne des normes de l’alliance.
Plan d’action « réaliste » pour 2024
Volodymyr Zelensky attend du nouveau chef d’état-major un « plan d’action réaliste » tenant compte « de la situation actuelle et des perspectives sur le champ de bataille ». Oleskandr Syrsky devra notamment régler l’épineux problème de manque de rotations des troupes au front, épuisées après bientôt trois ans de guerre. Zaloujny avait plaidé pour la mobilisation de 500 000 Ukrainiens. Le président s’y est opposé, sans que le Parlement prenne pour l’instant de décision.
Un commandant « des forces des systèmes sans pilote » doit également être nommé, soulignant l’importance des drones sur le champ de bataille. Autant de changements à amener et de nouveaux officiers qui vont émerger, avec pour objectif de faire de « l’armée ukrainienne une armée victorieuse ».
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