Eure-et-Loir: un boulanger ouvre une cagnotte pour éviter la faillite

Des baguettes de pain (photo d’illustration).

“C’est notre dernier espoir”. Depuis trois semaines, un long message est affiché sur la porte vitrée de la boulangerie d’Alluyes, en Eure-et-Loir. Le boulanger et sa femme ont ouvert une cagnotte pour demander de l’aide à leurs clients, craignant de devoir fermer définitivement leur commerce si la situation ne s’améliore pas. Depuis le début de l’année, un peu plus de 900 boulangeries ont été placées en liquidation ou en redressement judiciaire en France, selon le cabinet Altarès.

“Nous lançons cet appel à l’aide car cela fait sept ans que l’on se bat pour faire vivre cette boulangerie”, mais la mairie “n’a aucun fond pour nous aider”, indique le message.

Les habitants du village ont fait preuve de solidarité, puisque plus de 2.000 euros ont déjà été récoltés. “Je vais participer, bien sûr. J’espère vivement que la boulangerie ne fermera pas. C’est sûr qu’ici, sans boulangerie…”, constate une cliente. “Ça serait dommage de perdre le peu qu’on a”, estime une autre cliente. Pour éviter la fermeture, il faudrait 1.000 euros supplémentaires. Une bouffée d’oxygène qui leur permettrait de tenir jusqu’à la fin du remboursement de leur crédit au mois de mai prochain.

Facture d’électricité

Car les temps sont très durs: leur facture d’électricité devrait augmenter de 50% cette année malgré leurs efforts pour limiter la consommation. “Le poste qui coûte le plus d’électricité, c’est le four. Le matin, on travaille sur quatre soles [étages, ndlr] et à partir de 11h ou 11h30, j’en coupe trois”, explique le boulanger, Aurélien Martin. Quant aux matières premières, les prix ont bondi de 25 à 30%. Avec toutes les factures qui s’empilent, le couple de boulangers a anticipé une possible fermeture.

“En tant que gérant, on n’a pas le droit au salaire, donc on se retrouvait à la rue avec trois enfants”, explique Aurélien Martin. La commune, de son côté, a aidé la boulangerie à décrocher un prêt à taux zéro pour payer ses prochains loyers. “Ce sont des commerces vitaux”, s’inquiète le maire d’Alluyes, Jean-Marc Petit. Sur la place principale du village eurélien, un bar-tabac-restaurant a déjà fermé ses portes ce mois-ci. En 2023, 62% des communes françaises ne disposaient d’aucun commerce.

“Il y a d’autres communes qui ont perdu leurs commerces (…). On fera tout ce qu’on peut pour les préserver”, assure Jean-Marc Petit.

“Privé de lien social”

“Aujourd’hui, si un boulanger n’arrive pas à augmenter tous ses prix”, il “se trouve en difficulté”, notamment “par rapport à la concurrence des supermarchés”, souligne Dominique Anract, président de la Confédération nationale de la boulangerie pâtisserie française (CNBPF), sur le plateau de BFMTV. Un village qui perd sa boulangerie “est privé de pain, mais aussi privé de lien social”, car il s’agit “quelques fois du dernier commerce que l’on trouve dans ces villages”, estime-t-il.

Le président de la CNBPF pointe notamment du doigt la forte hausse du coût de l’énergie de l’année passée, contraignant les boulangeries à signer des contrats d’électricité aux tarifs élevés. “Les contrats qui sont faits actuellement sont avec des tarifs tout à fait honnêtes” car les prix ont baissé, note Dominique Anract. “On a demandé” à Bercy “que l’on puisse casser ces contrats” trop chers, pour que les boulangeries “puissent repartir sur de l’électricité normale”, avance-t-il.