Congé de naissance : Qu’est-ce qui va changer en pratique ?

Une experte en ressources humaines réagit à la création du « congé de naissance » de six mois pour les deux parents, appelé à remplacer le congé parental actuel afin de pallier la baisse de la natalité en France

congé de naissance : qu’est-ce qui va changer en pratique ?

Pied d’un bébé Crédit : Catherine Delahaye/SIPA/1510160747

interview – Une experte en ressources humaines réagit à la création du « congé de naissance » de six mois pour les deux parents, appelé à remplacer le congé parental actuel afin de pallier la baisse de la natalité en France

Annoncé par Emmanuel Macron, le congé de naissance se veut la solution pour lutter contre la baisse de la natalité en France. En effet, moins de 700.000 naissances ont été enregistrées en France en 2023, un niveau jamais vu depuis la Seconde Guerre mondiale. Côté entreprises et ressources humaines : qu’en est-il ? Réponse avec Dominique Podesta, ancienne RH de grands cabinets de conseil, associée chez Louis Dupont, entreprise experte du management de transition.

Pourquoi ce congé va-t-il remplacer le congé parental ? Quelles différences ?

Il y a une volonté de moins impacter la carrière des femmes en les tenant éloignées du marché du travail moins longtemps. Ce congé de naissance ne remplacera ni le congé de paternité ou de maternité mais sera une nouvelle forme de congé parental. Ce congé sera plus court (actuellement le congé parental va jusqu’aux 3 ans de l’enfant) mais mieux rémunéré que ce qui existe aujourd’hui.

Qu’est-ce que ce congé propose concrètement ?

Ce congé de naissance s’appliquerait sur une durée de 6 mois et pourrait prendre effet dans le cadre du congé de maternité ou de paternité. Il reste sur la base du volontariat, pour les femmes et les hommes. Une ancienneté minimum d’un an dans l’entreprise serait requise. Les conditions de rémunération et d’accès à des aides ne sont pas encore définies. En pratique, le congé parental est aujourd’hui utilisé notamment, à temps plein ou à temps partiel (souvent le mercredi) pour un projet personnel de vie familiale et pour pallier l’absence ou la rigidité du mode de garde. Au cours de ce congé, le contrat de la salariée est suspendu. A voir donc si cette condition sera revue dans le cadre du nouveau congé de naissance.

Quelles réactions des RH en entreprise ? L’idée est-elle bien reçue ?

Le contour du dispositif doit encore être précisé et notamment les modalités d’indemnisation. Le dispositif peut constituer un élément d’attractivité dans les entreprises notamment ETI et PME qui ne disposent pas d’offre de places en crèche ou de congés supplémentaires pris en charge par l’entreprise. Si la possibilité de cumuler ce congé pour les deux parents se confirme, ce sera une évolution positive qui contribuera à impliquer les pères et donc à faire gommer les écarts de carrière qu’engendre l’absence liée à la naissance d’un enfant. Des risques existent néanmoins : l’absence prolongée d’une salariée et/ou d’un salarié risque d’avoir un impact sur l’organisation des équipes, alors qu’on observe déjà de la fatigue mentale liée au manque de personnel. Là où la mesure est pensée pour favoriser les carrières des femmes, au contraire, le risque de prolonger l’absence serait de passer à côté d’opportunités de poste. Par ailleurs, attention à l’effet d’annonce : si les femmes prenaient 3 ans, c’est que cela correspondait à un besoin de « vivre » sa parentalité. Si nous avons confirmation que ce nouveau congé de naissance se substitue au congé parental, pas sûr que ce soit une amélioration.

Quelles conséquences pour la carrière des jeunes parents au sein d’entreprise ?

Plusieurs ! D’abord il y aura un impact immédiat sur la gestion des équilibres de vie grâce à une meilleure indemnisation, si cela se confirme. Les jeunes parents auront alors plus de facilité à concilier leur travail et leur nouvelle vie de parent. Ensuite, l’implication des hommes dans la parentalité sera facilitée et contribuera à faire évoluer les mentalités et les freins pour les carrières des femmes, puisqu’un homme pourra aussi s’absenter. Enfin, les statistiques montrent également que les parents sont plus âgés, ce qui signifie qu’ils sont plus avancés dans leur carrière quand ils s’absentent. Imaginer que les cadres femmes vont s‘absenter plus longtemps alors même qu’aujourd’hui, le congé maternité est un frein pour accéder aux postes à responsabilités, est un leurre.

Ce congé de naissance impose-t-il plus de flexibilité de la part des entreprises ?

Évidemment, si la promesse que laisse présager le congé de naissance s’avère réelle : être auprès de son enfant en étant mieux indemnisé que ce que prévoit l’actuel congé parental. Les organisations risquent d’être bousculées, à l’heure où les équipes sont courtes et les compétences manquantes. Les DRH devront s’interroger sur de nouvelles solutions pour renforcer temporairement les équipes et accompagner les managers qui peinent déjà à gérer leurs objectifs et les attentes des salariés. N’oublions pas que le tissu des entreprises est composé essentiellement d’ETI et de PME, qui ne disposent pas d’équipe RH pléthorique pour gérer ce nouveau dispositif, ni d’équipes suffisamment larges pour gérer des absences assez longues de salariés. On peut y voir là une opportunité pour les seniors : leur agilité en interne et en externe sur des missions temporaires est sans aucun doute une piste à explorer…

Comment devront-ils le calculer ?

Il semblerait que l’indemnisation dépendra du niveau de rémunération. Cela risque de créer encore un déséquilibre d’attractivité sur les territoires. Si les grandes entreprises pouvaient envisager un complément d’indemnisation dans le cadre de leur politique de la parentalité, ce serait plus compliqué financièrement pour les ETI et PME. Il est trop tôt pour se faire peur ou s’enthousiasmer.

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SociétéC’est quoi ce congé de naissance, qui doit remplacer le congé parental ?SociétéQu’est-ce que le « congé familial », ce nouveau droit prévu pour les familles en 2025 ?

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