CO2 : comment tous les constructeurs automobiles ont échappé aux amendes de l'UE

Échappement voiture thermique

Volkswagen AG

Depuis 2020, l’Union européenne impose des valeurs d’émissions de CO2 à ne pas dépasser aux constructeurs automobiles. S’ils n’atteignent pas leurs objectifs, propres à chacun des constructeurs, car pondérés en fonction de la masse moyenne de leurs voitures vendues dans l’UE, ils se voient infliger de lourdes amendes.

En 2020, année d’entrée en vigueur de cette nouvelle norme CAFE (Corporate Average Fuel Economy), le montant total de ces amendes aurait atteint 510 millions d’euros. Le groupe Volkswagen aurait ainsi dû s’acquitter à lui seul d’un montant de plus de 100 millions d’euros, pour avoir manqué son objectif de seulement 0,75 g de CO2/km, mais sur un nombre très important d’immatriculations dans l’UE. La marque Subaru avait quant à elle dépassé de 34 g de CO2/km ses objectifs d’émissions moyennes, pour 16 176 immatriculations dans l’UE en 2020, ce qui devrait logiquement lui valoir une amende de 52 millions d’euros, soit 3230 € par voiture vendue tout de même (source : Automotive News Europe).

Mais surprise, en 2022, année des derniers résultats publiés par la Commission européenne, pas un seul constructeur n’aurait eu à s’acquitter d’une amende.

Pas une seule amende infligée sur l’année 2022

Pour les années 2020 à 2024, les régulateurs européens ont fixé un objectif de 95 g de CO2/km pour l’industrie automobile, selon l’ancien cycle de mesure NEDC. Avec le nouveau cycle WLTP, cet objectif équivaut à 115,1 g de CO2/km. En guise de comparaison, le malus écologique démarre en France à 118 g de CO2/km (cycle WLTP) depuis 2024.

En 2022, les émissions moyennes des voitures vendues dans l’UE sont ainsi tombées à 108,1 g CO2/km (cycle WLTP). Un seul constructeur a dépassé le seuil limite qui lui avait été fixé, Bugatti, mais avec moins d’une dizaine de voitures immatriculées dans l’UE en 2022, la marque n’aurait pas eu à s’acquitter d’une amende.

Normes CAFE 2022

Les valeurs d’émissions moyennes de CO2/km (cycle WLTP) des principaux constructeurs automobiles et *pools* de constructeurs sur leurs voitures immatriculées dans l’UE en 2022, ainsi que leurs objectifs respectifs.

Agence européenne pour l’environnement

Pour se mettre en conformité, les autres entreprises ont usé de différentes stratégies. La première a été de former des pools, qui permettent aux constructeurs de mettre en commun leurs émissions de CO2, au sein d’un même groupe ou non. Honda et Jaguar Land Rover ont ainsi pu se rallier à Tesla pour compenser leurs émissions de CO2, par exemple.

L’autre levier qui a permis de faire baisser les émissions de CO2 moyennes des constructeurs est évidemment l’électrification. Puisque la norme CAFE ne prend en compte que les émissions à l’échappement, les voitures électriques sont largement suraventagées. Non seulement elles émettent officiellement 0 g de CO2/km, mais en plus, du fait de leur masse plus élevée, elles permettent d’adoucir les objectifs infligés aux constructeurs. Plus ils immatriculent des voitures lourdes, moins leurs objectifs seront stricts.

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Mais cette électrification n’est pas uniquement portée par les voitures 100 % électriques. Les modèles hybrides rechargeables, eux aussi plus lourds que les voitures thermiques traditionnelles, sont également très avantagés par la réglementation. Comme l’a récemment reconnu la Commission européenne, les valeurs de consommation et d’émissions homologuées pour ces modèles ne relatent pas du tout leur usage réel. Ils émettraient à l’usage 3,5 fois plus de CO2 que ce qu’annonce le cycle WLTP, sur lequel se base la norme CAFE.

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La Commission prévoit certes de revoir le protocole d’homologation des voitures hybrides rechargeables, mais “ces changements s’appliqueront en deux étapes consécutives, à partir de 2025 et 2027” seulement.

Bien qu’aucune amende n’ait été infligée pour l’année 2022 et qu’il puisse en être de même en 2023 et 2024, la norme CAFE a malgré tout avantagé les constructeurs dont les voitures émettent le moins de CO2. Les pools entre différents constructeurs n’ont ainsi pas été formés à titre gracieux. Pour s’associer à Tesla, Honda et Jaguar Land Rover ont dû verser une somme conséquente au constructeur de voitures électriques, lui achetant en quelque sorte ses “crédits CO2”.

On remarque aussi que l’introduction des normes CAFE a accéléré la baisse des émissions de CO2 des voitures vendues dans l’UE, certes exagérée par les valeurs d’homologation très optimistes des voitures électriques et hybrides rechargeables.

Émissions de CO2 des voitures vendues dans l’UE

Les émissions de CO2 moyennes des voitures vendues dans l’UE et les futurs objectifs fixés aux constructeurs.

Agence européenne pour l’environnement

De prochains paliers difficiles à atteindre avant un passage redouté au tout électrique

Par ailleurs, plusieurs constructeurs redoutent déjà le prochain durcissement des objectifs de la norme CAFE, programmé pour l’année 2025. Il est pour l’instant prévu d’abaisser l’objectif moyen fixé à l’industrie automobile à 93,6 g de CO2/km (cycle WLTP), puis à 49,5 g de CO2/km en 2030 et à 0 g de CO2/km en 2035, date à laquelle les régulateurs prévoient d’interdire la vente de voitures thermiques neuves dans l’UE (hors e-fuels).

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Les patrons respectifs du groupe Volkswagen et du groupe BMW ont ainsi appelé l’Europe à adoucir ses objectifs de réduction des émissions de CO2. “Il n’est pas logique que l’industrie doive payer des pénalités alors que les conditions pour la montée en puissance des véhicules électriques ne sont pas en place”, a dénoncé Oliver Blume, CEO du groupe Volkswagen (source : Bloomberg). Sur la marche forcée vers l’électrique, Oliver Zipse, CEO du groupe BMW, estime qu'”on ne tient pas compte du fait qu’il s’agit de la décision libre de millions de clients” (source : Automotive News Europe).